Le boom de la femme toxique : comment la dark feminine énergie bouleverse les rapports hommes-femmes
Comprendre l’essor de la féminité toxique et son impact sur les relations, de la « gentille fille » à la bad bitch

Pendant longtemps, la femme idéale était perçue comme douce, disponible et entièrement dévouée à son foyer. Les stéréotypes la voulaient patiente, aimante et toujours à l’écoute, au point d’effacer ses envies personnelles. Depuis quelques années, on assiste à un basculement : sur TikTok et autres plateformes, de nombreuses influenceuses promeuvent une image inverse, inspirée d’une masculinité toxique qu’elles reprennent à leur compte pour s’imposer.
On parle désormais de bad bitch, de femme qui n’a besoin de personne et qui s’autorise à user de la manipulation pour maintenir le pouvoir dans ses relations. Les contenus se multiplient, présentant cette nouvelle féminité comme un moyen de se libérer de l’oppression masculine.
1.2. La « dark feminine énergie » : au cœur du phénomène
Au centre de ce mouvement se trouve la notion de dark feminine énergie. Contrairement à la light feminine énergie, associée à la douceur, au pardon et à l’innocence, la part « sombre » incarne le pouvoir, la confiance et la liberté. Sur TikTok, les coachs en développement personnel invitent les jeunes femmes à « reprendre le contrôle » en cachant leurs émotions, en étant « dangereusement » indépendantes et en usant de stratégies pour garder l’ascendant sur leurs partenaires.
Dans certains cas, cela va jusqu’à vanter des comportements toxiques, tels que le mensonge, le chantage ou la manipulation affective, le tout sous couvert d’« empowerment » féminin.
2. Des comportements destructeurs… pour tout le monde
2.1. Quand la vengeance remplace la quête d’égalité
L’une des critiques majeures à l’égard de cette féminité toxique est qu’elle reprend les mêmes travers qu’une partie de la masculinité toxique :
- Cacher toute forme de sensibilité (par crainte d’être considérée comme faible).
- Dévaloriser l’autre pour se sentir supérieur(e).
- Considérer la relation comme un rapport de force plutôt qu’un échange mutuel.
Au lieu de chercher à déconstruire les stéréotypes pour instaurer un véritable respect réciproque, on verse dans la vengeance. Les adeptes de la dark feminine énergie estiment qu’après des décennies de domination masculine, il est légitime de « faire payer » les hommes. Or, reproduire un schéma de domination ne fait qu’accroître les tensions et perpétue la guerre des sexes.
2.2. Les femmes elles-mêmes en première ligne
La tendance de la vanilla wife illustre bien l’hostilité qui se développe entre femmes. Les « femmes fatales » autoproclamées s’opposent aux femmes mariées ou plus traditionnelles, jugées « ennuyantes ». Les réseaux sociaux regorgent de vidéos se moquant de l’épouse idéale (vue comme fade ou naïve), tout en prônant la liberté sexuelle et l’absence d’engagement.
Ce clivage artificiel finit par mettre en concurrence les femmes entre elles, dévalorisant celles qui choisissent le mariage ou une vie familiale classique. L’idée d’un soutien mutuel féminin se perd, alors même que le premier objectif revendiqué de ce courant se voulait être un mouvement de solidarité et d’« empowerment » pour libérer la gent féminine du patriarcat.
3. Des racines socioculturelles complexes
3.1. La rébellion contre la féminité « imposée »
Dans de nombreuses sociétés, la femme est depuis toujours soumise à des attentes rigides : elle doit prendre soin de son apparence sans être trop provocante, gérer la maisonnée, avoir de bonnes manières et garder un tempérament calme. Il est donc compréhensible que certaines veuillent briser ces codes.
Dans les années 2010, le phénomène de la sad girl émergait déjà pour dénoncer les injonctions à la perfection. Aujourd’hui, la révolte prend une forme plus agressive : plutôt que d’exprimer un mal-être, on choisit de se doter d’une carapace « noire », en repoussant violemment tout ce qui rappellerait la fragilité ou la douceur.
3.2. L’influence des réseaux sociaux et de la pop culture
Les plateformes comme TikTok, Instagram ou YouTube ont un rôle clé dans la propagation de ces nouvelles normes. Une foule de coach en séduction, de pseudo-spécialistes en développement personnel et de vidéastes à succès proposent des tutoriaux pour « devenir une vraie bad bitch ». Avec des messages accrocheurs et des montages percutants, ils (ou elles) touchent un public souvent jeune, en quête d’affirmation de soi.
Cette vague culturelle se nourrit également de l’imagerie hypersexualisée dans certains clips de rap ou de musique pop, où la femme puissante et insensible règne en maîtresse absolue. Dans cet univers, la vulnérabilité est perçue comme une faiblesse plutôt que comme un atout relationnel.
4. Les dangers de la généralisation
4.1. Entre masculinité et féminité : un débat qui enferme
Ironiquement, vouloir échapper aux stéréotypes de genre entraîne souvent… de nouveaux stéréotypes. Après avoir critiqué le dogme de la femme éternellement docile, on impose l’image d’une femme froide, obsédée par le contrôle. Pourtant, le vrai féminisme consiste à reconnaître la pluralité des identités : on peut être sensible et forte à la fois, réussir une carrière professionnelle tout en choisissant (ou pas) la maternité, etc.
Comme pour la masculinité toxique, le problème ne vient pas du fait d’être un homme ou une femme, mais bien de comportements destructeurs qui n’ont pas de genre en soi.
4.2. De la justice sociale à l’amalgame
Promouvoir l’idée que « tous les hommes sont des adversaires à manipuler » finit par nuire à la cause de l’égalité. De la même façon, qualifier systématiquement une femme mariée de « vanilla wife » engendre des conflits inutiles. Les relations humaines sont complexes, et chacun(e) devrait avoir la liberté de vivre sa féminité ou sa masculinité selon ses aspirations, sans être stigmatisé.
5. Vers une nouvelle définition de l’empowerment
5.1. L’importance du respect mutuel
Si l’objectif est de regagner un pouvoir perdu, l’équilibre entre liberté personnelle et respect de l’autre est primordial. Être confiant et affirmé ne signifie pas écraser son partenaire ou nier toute émotion. Au contraire, le véritable empowerment implique la capacité à exprimer ses limites clairement, à négocier et à construire une relation égalitaire.
5.2. Cultiver la nuance dans les relations
Au lieu de tomber dans des extrêmes, il est possible de s’approprier certains aspects positifs de la dark feminine énergie, comme l’assurance, la créativité et l’audace, tout en conservant des qualités traditionnellement associées à la light feminine énergie : l’empathie, l’écoute et la compassion.
De même, combattre la masculinité toxique ne signifie pas que tous les hommes doivent renoncer à leur force ou à leur leadership, mais plutôt qu’ils doivent adopter un comportement inclusif et bienveillant. L’idée n’est pas de perpétuer une guerre des sexes, mais de trouver un terrain d’entente pour bâtir des relations équilibrées et épanouissantes.
A lire: 99% des femmes trompent-elles ? La vérité dévoilée !
Le phénomène de la femme toxique est né d’une volonté compréhensible de s’affranchir des rôles assignés et des injustices subies. Toutefois, en s’enfermant dans des comportements de manipulation et de vengeance, on ne fait que reproduire un modèle d’oppression.
Plutôt que de se définir uniquement par l’opposition, il est temps de valoriser une liberté totale : celle de choisir qui l’on veut être, sans laisser un modèle « idéal » – qu’il soit traditionnel ou rebelle – dicter nos attitudes. La meilleure façon de se libérer réellement, c’est de prendre conscience de sa propre valeur, d’assumer toutes ses facettes (douces, fortes, sensibles ou passionnées) et de reconnaître ces mêmes facettes chez l’autre.