Pourquoi Elon Musk veut démanteler la justice sociale : les leçons surprenantes de Thomas Sowell

Peu après l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement plus conservateur, Elon Musk a annoncé la création du « Department of Government Efficiency », surnommé DOGE. Son but ? Passer en revue chaque dépense pour traquer et éliminer les inefficacités.

• Une mesure inspirée de l’histoire : De la révolte du Boston Tea Party à la Révolution française, la réduction de l’impôt et la contestation de l’ingérence étatique ne sont pas nouvelles. Elon Musk s’inscrit dans cette filiation en mettant l’accent sur la responsabilité individuelle et la limitation du pouvoir public.
• Pourquoi la gauche s’insurge : Si la chasse au gaspillage budgétaire semble faire consensus, la gauche progressiste américaine craint surtout que le DOGE ne serve de prétexte pour démanteler les programmes de justice sociale, comme les aides spécifiques à certaines minorités.

1. Les illusions de la justice sociale selon Thomas Sowell

Pour comprendre la philosophie derrière le « grand ménage » de Musk, il faut se tourner vers l’œuvre de l’économiste Thomas Sowell, et en particulier son livre dénonçant les « illusions » autour de la justice sociale.

1.1. L’erreur de l’égalité « naturelle »

De nombreux défenseurs de l’équité considèrent que, « toute chose égale par ailleurs », les humains devraient obtenir des résultats semblables. D’où l’idée de discriminer positivement certains groupes pour corriger les écarts.

• Facteurs culturels et géographiques : Pour Sowell, bien des disparités (comme la passion des Suédois pour le hockey sur glace) s’expliquent par la géographie ou l’histoire locale. Imaginer que tous les groupes évoluent de la même façon relève du fantasme.
• Inégalités réciproques : Si un groupe est très performant dans un domaine, il risque de l’être moins dans un autre. Se concentrer sur un seul terrain (comme le niveau d’études ou la proportion de femmes dans la recherche scientifique) peut donner une image trompeuse des écarts réels.

1.2. Les limites de la focalisation raciale

Aux États-Unis, le débat sur les inégalités se concentre souvent sur l’opposition entre Blancs et Afro-Américains. Thomas Sowell, lui-même noir, nuance cette vision :

• Des réussites diverses : Les communautés d’origine asiatique (Chinoise, Indienne, etc.) dépassent les revenus moyens des Blancs américains, prouvant que la « suprématie blanche » n’explique pas tout.
• Auto-sabotage par la peur du racisme : Sowell évoque le cas d’un jeune Noir qui n’ose pas s’engager dans l’armée de l’air, persuadé d’y être victime de racisme. Or, dès la Seconde Guerre mondiale, des pilotes noirs ont déjà intégré cette institution. Pour l’économiste, l’idée d’un racisme omniprésent finit par dissuader certains Afro-Américains de tenter leur chance.

2. Les « pièces d’échec » : quand l’État ignore les comportements

Thomas Sowell reprend l’image d’un échiquier pour montrer que le législateur oublie souvent que les individus ne sont pas des pions inertes. À chaque nouvelle loi, ils adaptent leurs choix.

• L’exemple des hausses d’impôts : Taxer les plus riches incite ces derniers à délocaliser, à changer d’investissements, ou à recourir à des montages financiers. Les gouvernements surestiment souvent leurs recettes fiscales en négligeant ces stratégies d’évitement.
• Le contrôle des prix : Bloquer le prix d’un produit de base paraît populaire à court terme, mais entraîne rapidement une pénurie, car producteurs et distributeurs changent de comportement pour réduire leurs pertes.

Le piège de la centralisation

S’inspirant de l’économiste Friedrich Hayek, Thomas Sowell estime que le savoir économique est trop diffus pour qu’une élite puisse décider de tout. Même le meilleur expert ignore des paramètres que seul un acteur local connaît. Cette méconnaissance mène à des échecs quand l’État s’aventure à planifier l’économie ou à multiplier les politiques de discrimination positive sans mesurer leurs effets pervers.

3. Un retour à la responsabilité individuelle

À travers sa critique, Thomas Sowell plaide pour une réduction de l’empreinte étatique au profit de l’initiative personnelle et de la libre concurrence. Dans cette optique, la logique du DOGE d’Elon Musk apparaît cohérente.

• Démanteler l’assistanat contre-productif : Sowell souligne que certains programmes « sociaux » découragent l’effort en rendant leurs bénéficiaires dépendants à long terme.
• Favoriser l’autonomie : Pour l’économiste, le meilleur moyen de soutenir les minorités n’est pas d’imposer des quotas ou des ajustements artificiels, mais de leur offrir la chance de développer leurs compétences — sans stigmatisation ni label de « victime ».

Moins d’État : une illusion ou une piste vers plus d’équité ?

Entre la volonté d’Elon Musk de réduire les dépenses d’État et l’analyse de Thomas Sowell sur les illusions de la justice sociale, un même fil conducteur se dessine : moins d’intervention publique ne signifie pas forcément plus d’inégalités. Au contraire, une vision trop centralisée de l’équité et de la redistribution peut produire des résultats contraires aux intentions affichées.

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En fin de compte, Sowell propose un retour au pragmatisme : évaluer chaque politique sur ses effets réels, plutôt que sur l’attrait d’un discours moral. Cette prudence face à la planification étatique peut éclairer un débat français où la notion d’égalité des chances reste l’objet de tensions politiques. La réduction de certaines dépenses publiques, loin de constituer une simple mesure comptable, s’inscrit ainsi dans une philosophie de la responsabilité et de la liberté individuelle — deux concepts qui, s’ils sont mal compris, peuvent être confondus avec de l’indifférence ou un manque de solidarité.